bauhaus
imaginista
Article

Mémoires

Melehi enseigne: studio de Mohamed Melehi

Brochure de l'Ecole des Beaux-Arts de Casablanca, 1962–65

Archives: Toni Maraini.

J'étais âgé de seize ans lorsque j'entrepris mon premier itinéraire à la recherche d'une vocation professionnelle entre Asilah, Fès puis Tétouan. Avant de m'avancer dans ce récit je voudrais signaler mon legs onirique.

1952. Tanger était pour moi un livre ouvert, une fenêtre sur le monde. La liberté de voir, de découvrir et de sentir, de tisser l'habillement de mes rêves. La ville était alors un territoire international, on y parlait plusieurs langues en plus de l'arabe dialectal : le français, l'espagnol, l'italien ou le portugais. Cependant l'anglais (américain), cette langue débarquée des bagages américains durant la seconde guerre mondiale, paraissait plus attirante. Parler en anglais avec l'accent américain, dans l'expression du mot et la gestuelle, donnait l'avantage certain de ressembler à un cowboy, chose que ne permettait ni l'espagnol ni le français.

De ces mêmes bagages, Coca Cola faisait son apparition, venant directement à Tanger depuis l'Amérique avec son parfum nouveau et frais. Première limonade en couleur au monde. La bouteille aux courbes féminines roulait sensuellement dans la main. Les femmes à Tanger, de toutes nationalités confondues, venaient prendre le café et le thé à la menthe à Soco Chico, au café Central, où un Musical jouait sans arrêt, nuit et jour. Les cigarettes blondes se distribuaient partout, et étaient aussi fumées par des blondes. L'apothéose, c'était les salles de cinéma à l'architecture cubiste comme l'Alkazar et le Capitole qui montraient en boucle les films de Clark Gable, Humphrey Bogart, sans oublier Lana Turner. A seize ans, l'histoire de Tom Sawyer m'attirait davantage.

La Décision de devenir un Peintre

Quelques années plus tard, c'est devant le film Un Américain à Paris que j'ai eu une révélation : j'allais devenir peintre. À Tanger, à part Coca-Cola et le cinéma, il y avait aussi des galeries de peinture. Voir les peintures des galeries me rappelait mon enfance quand j'observais les emballages des produits alimentaires importés d'Espagne, illustrés par les reproductions des grandes toiles de Goya Murillo ou Velázquez. Ces images me transportaient par leur beauté graphique. Gravées dans ma mémoire et mes souvenirs d'adolescence, entre rêve et réalité, elles devinrent la preuve de ma vocation : devenir un peintre comme eux. Entre le souvenir des produits illustrés par Goya et Velázquez et la découverte d'une petite reproduction de Van Gogh dans une librairie à Tanger, la structure de ma carrière professionnelle commençait à prendre forme.

Le Contexte

Je suis né à Asilah, petite ville sur la côte Atlantique au nord du Maroc à 40 kilomètres de Tanger. Parsemée de mausolées maraboutés constituant les points cardinaux de la ville et délimitant son tissu urbain, nous gravitions dans cet espace sans perdre les liens spirituels soufis qui marquaient notre stabilité morale. Navigué à vue dans une mer d'influences originelles et occidentales, je me confrontai à mes premiers dilemmes lorsque j'entrai dans le monde de l'art. Le but, c'était l'Ecole des Beaux-Arts, sortir du Maroc. Pour cela, il fallait atteindre l'Europe, se rendre en Espagne. À la fin des années cinquante, les académies des Beaux-Arts de Séville et Madrid, où je me familiarisais avec l'alphabet des arts plastiques, dispensaient un enseignement académique et rigoureux. L'enseignement datait du XVIIIème siècle, avec ces cours de dessin et de modelage où nous reproduisions la figure humaine à force de contours et d'arrondis classiques, dans une atmosphère marquée par un héritage iconographique.

L'apprentissage et l'appréciation des bases de l'esthétique est important dans la tradition des Beaux-Arts, mais l'art garant de la spiritualité et de l'héritage des civilisations que je portais, où se trouvait-il ? Immigrer pour apprendre était un problème, alors même que l'islam puisait sa connaissance de voyages lointains, parfois même jusqu'en Chine. Les académies des Beaux-Arts du XXème siècle s'appuyaient toujours sur une iconographie classique. À l'époque, apprendre des autres civilisations, se confronter à des modes d'interprétations et de représentations universelles en s'appuyant sur la philosophie par exemple, ne faisait pas encore partie du programme.

Les Découvertes

Après dix ans de carrière entre l'Espagne, l'Italie, la France et les États Unis, je revins au pays pour partager l'expérience acquise ailleurs. La seule possibilité qui m'était offerte était de m'engager dans l'enseignement artistique à l'École des Beaux-Arts de Casablanca. Mais sur quels principes et techniques se baser ? Le Maroc si proche de l'Europe, alors que 12 kilomètres les séparent seulement, en est pourtant diamétralement l'opposé en terme de pratique artistique.

Un Dilemme

En entamant une réflexion sur le programme pédagogique, nous butions1 contre l'absence d'une tradition de représentation, notamment dans une société où la figuration n'a jamais été un objet d'intérêt ou un moyen de communication.

En réalité, la figuration n'est pas interdite dans les pays de l'islam comme beaucoup le prétendent. Au Maroc, la représentation est conditionnée par la présence des étrangers, les puissances coloniales mais pas seulement. À l'époque où les religions du livre n’étaient pas encore arrivées au Maroc et en Afrique du Nord, les mythes et la vie quotidienne n’étaient pas représentés selon les codes classiques de l'antiquité grecque ou romaine. L'islam à son tour n'a jamais codifié ou imposé une interdiction de la représentation. N'oublions pas la cour des lions à Grenade et les carafes et objets utilitaires en formes d'animaux pour ne citer que ces quelques cas. À l'époque punique par exemple, la représentation des mythes et des symboles religieux d'Afrique du Nord était souvent simplifiée et traitée par des stylisations abstraites. Le Maroc commence au XXème à s'ouvrir et à s'adapter aux standards de la modernité par l'influence des protectorats français et espagnol. Une résistance s'opérait cependant contre l'usage de la figuration assimilée au mode de vie de l'occupant.

Maghreb Art, éditée par l'École des Beaux-Arts de Casablanca, N°1, 1965.

 

Exposition annuelle des étudiants dans la Galerie de l’Ecole des Beaux-Arts, 1966
Archives: Famille Chabâa.

En ce qui concerne la pédagogie artistique, on assiste timidement à la naissance de quelques établissements qui ne portaient aucun intérêt ni au patrimoine artistique national ni à la modernité, ignorant ainsi l'histoire de la richesse plastique de la région.

Le Maroc s'ouvrait lentement à la représentation de la figure humaine par le biais de la photographie. Se faire prendre le portrait paraissait tout de même bizarre et seul les plus courageux s'y collaient. La population s'ouvrit à l'usage du portrait d'abord par l'effigie du sultan Mohamed V, établissant ainsi un support de communication nouveau autour de la personnalité suprême du Roi. Ainsi, le mouvement nationaliste marocain utilisa l'image comme support de propagande. L'image joua un rôle primordial au point que les portraits de Mohamed V et de la famille royale se trouvèrent vite accrochés dans toutes les maisons avant d'être affichés dans les commerces et les lieux publics. Le refus de l'image se fit moins virulent et l'interdiction aux enfants de dessiner des figures humaines, y compris celle du sultan Mohamed V, cessèrent.

Immédiatement après l'indépendance du Maroc en 1956, nous assistâmes à l'apparition d'une expression picturale à travers le royaume qu'on dénomma la “Peinture naïve marocaine” et dont les milieux peu avertis à l'art faisaient le jeu, art qui était à vrai dire appréciée avant tout par la communauté étrangère établie au Maroc.

Le Retour

Dans les années soixante, les jeunes diplômés en Europe, de toutes les disciplines y compris celles des Beaux-Arts, revinrent au Maroc. Les artistes donnaient la preuve de leurs connaissances et de leurs compétences afin de participer au développement et renouvellement du pays. Après des expériences non concluantes dans le domaine des Beaux-Arts, nous avons été attirés par la richesse des arts et des métiers marocains, en particulier les arts et l'architecture populaires dans les espaces ruraux en premier lieu, mais aussi citadins. Nous nous passionnions pour les tissages des tapis et des kilims. Ces objets reflétaient une palette de couleurs et de formes qui dialoguaient joyeusement avec les peintres européens post-impressionnistes.

Dessin de Mohamed Melehi, Souffles, N°1, 1966, p. 26.

L'École des Beaux-Arts de Casablanca devint sans tarder le vivier des recherches artistiques et ethnographiques où un groupe d'enseignants2 élabora un nouvel enseignement pédagogique basé sur les ateliers et les cours d'histoire de l'art où une recherche moderne, loin du dogme académique vétuste, était appliquée. Nous avons alors entamé une enquête sur le terrain à la recherche des formes et des symboles3 contenus dans les productions artistiques notamment en milieu rural, afin de démontrer que la modernité n'est pas toujours tributaire d'une évolution ou d'une temporalité historique.

Pour mettre ce concept en pratique, nous avons dû tout d'abord prendre conscience des difficultés doubles de la mission : il fallait à la fois transmettre ces nouvelles connaissances par une démarche pédagogique aux étudiants mais aussi à l'ensemble du corps professoral. L'École des Beaux-Arts de Casablanca telle que depuis sa création en 1953 reposait sur un système occidental calqué sur le programme des écoles européennes de province. Le Maroc, dépositaire d'un patrimoine iconographique ethnique, méritait de devenir la source d'inspiration de ces courants artistiques.

La découverte de la bijouterie en argent du sud marocain et des peintures vernaculaires des plafonds dans les mosquées du Haut Atlas a eu sur nous un impact considérable4.

La substitution des méthodes classiques s'imposa afin de s'engager dans la correction du regard et de faciliter une meilleure appréciation des formes et des couleurs, malgré la résistance et l'opposition de certains collègues. Les découvertes de ce patrimoine permirent la substitution des méthodes classiques par l'introduction d'une méthodologie pédagogique cohérente avec la culture marocaine de sensibilités diverses. Une des procédures consistait à se baser sur une expérience pédagogique nouvelle, à savoir le remplacement des plâtres et des objets servant aux natures mortes par des tapis ruraux de la région à dominance arabisée du Haouz de Marrakech, et des bijoux en argent du Souss de la région de Tamazight, photographiés et agrandis pour permettre aux étudiants de réaliser des études documentaires basées sur les formes et les signes. Cette démarche était renforcée par un cours de calligraphie arabe et de dessin d'architecture appliquée dans la section de décoration5.

Le Bauhaus comme catalyseur

Notre propos ici n'est pas de faire une étude du Bauhaus, école qui par excellence révolutionna les mouvements artistiques et fut précurseur d'une application moderne de l'art dans le quotidien, mais plutôt de témoigner de sa contribution au dépoussiérage de notre regard, et de son action dans la pensée d'une réciprocité entre notre patrimoine artistique marocain et l'histoire universelle de l'art. Le Bauhaus nous conforta dans notre démarche et nous a ouvert les yeux sur notre patrimoine iconographique. On ne s'arrêtera pas ici sans citer Robert Delaunay, László Moholy-Nagy, Herbert Bayer, Paul Klee et son contact avec l'Afrique du Nord à travers son séjour en Tunisie, Wassily Kandinsky, le dépouillement dans les techniques et les compositions de Josef Albers, l'architecture de Ludwig Mies van der Rohe ou de Walter Gropius, pour ne citer que ces piliers.

La démarche du Bauhaus contribua à créer un pont entre ce mouvement occidental et notre vision de l'art moderne au Maroc, malgré l'absence d'une forte tradition de la figuration européenne classique. Les artistes marocains ont eu connaissance des différentes périodes historiques de l'art mais le Bauhaus a eu la particularité de nous réconcilier avec notre tradition artistique à haute sensibilité décorative.

●Footnotes
  • 1 Nous formions en 1965 un noyau dur, déterminé à changer la pédagogie de l'école datée de l'époque coloniale, composé de Farid Belkahia (directeur de l'école des Beaux-arts), Toni Maraini (professeur d'histoire de l'art), Bert Flint (professeur d'anthropologie) Mohamed Chabâa ( professeur d'arts graphiques), et moi-même Mohamed Melehi (professeur de peinture et de photographie).
  • 2 Op. cit., principalement Farid Belkahia, Toni Maraini, Bert Flint, Mohamed Chabâa, Mohamed Melehi.
  • 3 Cf Bert Flint: Forme et symbole dans les Arts du Maroc, tome 1 et 2, 1973.
  • 4 Voir Mohamed Melehi: ‘Notes sur les peintures des mosquées et les zaouias du Souss’, Maghreb Art n°3, 1969, publié par l'Ecole des Beaux-Arts de Casablanca.
  • 5 Le cours de calligraphie arabe est dispensé par Mohamed Chabâa tandis que celui d'architecture est tenu par Mohamed Bensalem.
●Author(s)
●Latest Articles
●Article
Common Threads — Approaches to Paul Klee’s Carpet of 1927

Paul Klee’s Carpet, 1927, creates a conundrum for scholars as it does not neatly fit the existing theoretical models concerning how European artists engage with non-Western art and culture, while at the same time opening up exciting new avenues for inquiry. → more

●Article
Paul Klees bildnerische Webarchitekturen

Für die Entwicklung seiner abstrakten Bildsprache und seines Bauhaus-Unterrichtes bediente sich Paul Klee unterschiedlicher Quellen, die er im Alltag, auf seinen Reisen oder in Büchern entdeckte. Das Studium nicht-europäischen Designs von Gebäuden und Stoffen, die Fantasiearchitektur der aus Tunesien mitgebrachten Aquarelle oder die auf Papier entworfenen Stoffmuster der Weberinnen bildeten die Grundlage für Werke wie Teppich, 1927, 48. → more

●Article
Weltkunstbücher der 1920er-Jahre — Zur Ambivalenz eines publizistischen Aufbruchs

Um 1900 erschienen die ersten Kompendien und Handbücher über sogenannte Weltkunst. Nach dem Ersten Weltkrieg explodierte dann die Anzahl der Publikationen über außereuropäische Künste. Diese fanden auch sogleich Eingang in die 1919 neu etablierte Bauhaus-Bibliothek. Diese Buchreihen lassen erkennen, unter welchen Bedingungen nichteuropäische Kunst in den 1920er-Jahren rezipiert wurde: als Inspirationsmaterial, als Ausdruck der Kanonkritik an einer europäischen Hochkunst und als Plädoyer für die Aufhebung zwischen Kunst und Kunsthandwerk, aber vor allem auch welches Verständnis von „Welt“ hier reproduziert wurde. → more

●Article
Dry Time — Anni Albers Weaving the Threads of the Past

When the Bauhaus was formed it was meant to be the reversed image of contemporary history and society. If the outside world was a field where opposing forces, in the form of class and national struggles, raged, the Bauhaus aimed to extricate itself from these conflicts in order to establish an alternative primordial community. In this essay, Maria Stavrinaki comments on what seems to be Anni Albers’s problematic relationship to the past in general and to history in particular. Anni Albers is not a unique case though, but rather a case study, which despite its particularities, can be considered as analogical to the Bauhaus in general. → more

●Article
Working From Where We Are — Anni Albers’ and Alex Reed’s Jewelry Collection

Not by nature acquisitive and certainly not art collectors, Josef and Anni Albers began in 1936 to collect Mexican figurines and other artifacts unearthed from that land’s memory. They described the country, which they first visited in 1935, as “the promised land of abstract art.” Returning to Black Mountain College Anni Albers and Alexander Reed began experimenting with everyday articles to create a strange and beautiful collection of objects of personal adornment inspired by their visit to Mexico. → more

●Article
Andean Weaving and the Appropriation of the Ancient Past in Modern Fiber Art

Ancient and Indigenous textile cultures of the Americas played a critical role in the development of the work of fiber artists who came of age in the U.S. in the late 1950s and 1960s. Anyone who has studied fiber art of this period, myself included, knows this well. They openly professed an admiration for traditions ranging from Navaho weaving, to the use of the backstrap loom in Mexico and Central America, to the ancient weaving techniques of Peru. → more

●Article
Anni Albers and Ancient American Textiles

At the time Anni Albers wrote On Weaving in 1965, few discussions of Andean textiles “as art” had appeared in weaving textbooks, but there were numerous publications, many of which were German books published between 1880 and 1929, that documented and described their visual and technical properties. Albers almost single-handedly introduced weaving students to this ancient textile art through her writing and her artistic work.  → more

●Article
Josef Albers and the Pre-Columbian Artisan

In his inaugural manifesto for the Staatliche Bauhaus, Walter Gropius proposed a new artistic agenda and pedagogical practice based on craft and artisanal principles. This article analyzes how prominent Bauhaus teacher and artist Josef Albers, entered into dialogue with a very specific kind of artisanal aesthetic: the pre-Columbian crafts he encountered on his many trips to Mexico. Revisiting his lecture “Truthfulness in Art” delivered in 1937, after his third trip to the country, the article studies the way in which Albers learned from the abstract tradition of pre-Columbian artisans, incorporating their knowledge into his own artistic and pedagogical practice. → more

●Article
“Every Moment Is a Moment of Learning“ — Lenore Tawney. New Bauhaus and Amerindian Impulses

“I felt as if I had made a step and maybe a new form. These evolved from a study of Peruvian techniques, out of twining and twisting. Out of that came my new way of working, of dividing and separating the piece.” Lenore Tawney’s “Woven Forms” are not purpose-built in a (Western) crafts sense; they move beyond traditional European rules of weaving and attempt to approach an indigenous attitude towards craft and technique. This essay shows how Tawney charted her own unique path in fiber art by linking Amerindian impulses with Taoist concepts of space and Bauhaus ideas. → more

●Interview
Questions about Lenore Tawney — An Interview with Kathleen Nugent Mangan, Executive Director of the Lenore G. Tawney Foundation

The search for the spiritual characterized Lenore Tawney’s long life, and was reflected in both the iconography and materials she used in her work. She was a regular diarist and her journals provide valuable insight into this deeply personal search. bauhaus imaginista researcher Erin Freedman interviews Executive Director of the Lenore G. Tawney Foundation, Kathleen Nugent Mangan, about Tawney’s approach and work. → more

●Video
kNOT a QUIPU — An Interview with Cecilia Vicuña

In this recorded interview, Vicuña describes how after she first learned about quipu, she immediately integrated the system into her life. Quipu, the Spanish transliteration of the word for “knot” in Cusco Quechua, is a system of colored, spun and plied or waxed threads or strings made from cotton or camelid fiber. They were used by the Inca people for a variety of administrative purposes, mainly record-keeping, and also for other ends that have now been lost to history.  → more

●Article
Diagonal. Pointé. Carré — Goodbye Bauhaus? Otti Berger’s Designs for Wohnbedarf AG Zurich

Gunta Stölzl. Anni Albers. These are the most prominent names today when one thinks of actors in the Bauhaus textile workshop. Both had been involved in the textile workshop since Weimar times, shaping it through their understanding of textiles and their teaching. Otti Berger did not join the workshop until Dessau. Stölzl and Albers succeeded in leaving Germany in 1931–32. And they succeeded in continuing to work as textile designers and artists. Berger succeeded in doing this, too, but accompanied by an ongoing struggle for recognition and fair remuneration. → more

●Article
The World in the Province from the Province to the World — Bauhaus Ceramics in an International Context

In this article Hans-Peter Jakobson presents the various influences, both national and international, and direct and indirect, influencing the views on ceramics taught in the Ceramic Workshop of the State Bauhaus Weimar Dornburg. Based on the life paths, inspirations and influences of the few ceramists who emerged from the Bauhaus workshop in Dornburg, he traces possible worldwide developments in ceramics to the present day. → more

●Video
Reading Sibyl Moholy-Nagy, Native Genius in Anonymous Architecture in North America, 1957

In the 1960s, the interest in a regional and vernacular architecture evolved into a sort of counterculture against the prevailing modernism in the USA. Sybil Moholy-Nagy’s book is an early document of this movement and today a classic of architecture history. It features buildings and construction techniques that emerge from social practices and whose builders remain anonymous. They include Amerindian settlement forms, Mexican pueblos and churches, as well as barns and houses of the first European settlers. → more

●Article
Vernacular Architecture and the Uses of the Past

In sending out the manuscript of Native Genius in Anonymous Architecture to a publisher, Sibyl Moholy-Nagy added a note on the “Genesis of the manuscript,” which is quite revealing about the intellectual trajectory that gave rise to it. She positioned herself as first and foremost a traveling observer, learning from direct contact with artefacts and buildings, curious about their histories and willing to interpret material evidence and local narratives. → more

●Article
The “Workshop for Popular Graphic Art” in Mexico — Bauhaus Travels to America

The global developments that led in 1942 to the appointment of Hannes Meyer, second Bauhaus director, as head of the workshop for popular graphic art, Taller de Gráfica Popular (henceforth referred to as the TGP), made it a focal point for migrating Europeans in flight from fascism. This essay aims to shed light on how the TGP was influenced by Europeans granted asylum by Mexico before and during World War Two, and, conversely, to explore the degree to which these exiled visual artists, writers, and architects’ ideas came to be influenced by their contact with artists active in the TGP. → more

●Article
Lena Bergner — From the Bauhaus to Mexico

The story of Lena Bergner is relevant to the history of architecture and design on account of her career passing through different ideological and cultural contexts. Here we will discuss her life and work, focusing on her training in the Bauhaus, her time in the USSR and her time in Mexico, where, along with her husband the architect Hannes Meyer, over a ten-year period she undertook cultural projects of great importance. → more

●Article
Of Art and Politics — Hannes Meyer and the Workshop of Popular Graphics

The Mexico of President Lázaro Cárdenas del Río was a fertile ground for the development of ideological questions, especially those originating from the left. The expropriation of oil fields, mining and large estates in 1938, the refuge granted Spanish republicans and members of the International Brigades in 1939, and the accord of mutual support between the government and syndicalist organizations all favored the formation of artistic and cultural groups willing to take part in the consolidation of revolutionary ideals which, until that point, had made little progress. Among these organizations was the Taller de Gráfica Popular, the Workshop of Popular Graphics. → more

●Article
bauhaus imaginista — and the importance of transculturality

What bauhaus imaginista has documented thus relates to a particular historical phase, one that opened a path to the renewal of the art situation in Morocco. And yet, although more recent generations of Moroccan art historians and critics often mentioned the period as a formative and unavoidable reference point, they never really deepened study of that period. It somehow remained in the shadows of other phases and realities. But cultural memory has its rhythms, and the moment arose when the years of the Casablanca Group called for attention, demanding its artistic accomplishments be better understood. In this regard, the bauhaus imaginista project came at the right moment and has had important repercussions. → more

●Article
The Bauhaus and Morocco

In the years when Western nations were committed in new projects of partnership, with what was then called the “Third World”, young artists and students from the Maghreb had grown up in the passionate climate of the struggle for independence, were talented, open to modernity, and eager to connect with twentieth-century international art movements, which were different in production and spirit from colonial ideology and culture. → more

●Article
École des Beaux-Arts de Casablanca (1964–1970) — Fonctions de l’Image et Facteurs Temporels

Utopie culturelle vécue, posture éthique et préfiguration de la modernité artistique et culturelle marocaine, l’École des Beaux-arts de Casablanca est, de 1964 à 1970, le lieu de cristallisations d’aspirations sociales et artistiques portées par un groupe d’artistes et enseignants responsables d’une restructuration des bases pédagogiques. → more

●Article
Les Intégrations: Faraoui and Mazières. 1966–1982 — From the Time of Art to the Time of Life

Les Intégrations exemplified a specific conceptual motif, one that acted not within a single field but rather implied a relationship of interdependence between different media (visual arts and architecture) and techniques (those of graphic arts and architecture). They thus allowed for the emergence of disciplines that were not static in formation but evolving in relation to one another. The intermedial relationship they created between art and architecture raises the question of what lies “between” these disciplines: how do they communicate with each other? What are the elements of language common to this “spirit of the times,” to the particular atmosphere of the late 1960s? → more

●Article
Chabâa’s Concept of the “3 As”

“Architecture is one expression of the fine arts” (Mohamed Chabâa, in: Alam Attarbia, No. 1, p. 36, 2001.)

Mohamed Chabâa’s consciousness of his national heritage and his interest in architecture both emerged at a young age. His concept of the “3 A’s”—art, architecture and the arts and crafts—grew out of his discovery both of the Italian Renaissance and the Bauhaus School during a period of study in Rome in the early 1960s. From then on, bringing together the “3 A’s” would become a central interest, a concept Chabâa would apply in various ways and fiercely defend throughout his long and varied career. → more

●Article
Don’t Breathe Normal: Read Souffles! — On Decolonizing Culture

The need for a synthesis of the arts and, with this, a change of pedagogical principles, was not only present at the beginning of the twentieth century (forces that prompted the Bauhaus’s foundation), but after WWII as well, during the “Short Century” of decolonization. This second modern movement and its relation to modernism and the vernacular, the hand made, and the everyday was vividly expressed through texts and art works published in the Moroccan quarterly magazine Souffles, published beginning in the mid-1960s by a group of writers and artists in Rabat, Casablanca and Paris. → more

●Article
A Bauhaus Domesticated in São Paulo

In March 1950, Pietro Maria Bardi, director of the São Paulo Art Museum (MASP, which opened in 1947), wrote to several American educational institutions requesting their curricula as an aid to developing the first design course in Brazil—the Institute of Contemporary Art (IAC), which was to be run as a part of the museum and would also be the country’s first design school. Despite being brief and objective, his missives did not fail to mention the “spirit of the Bauhaus,” explicitly linking the institute he hoped to found with a pedagogical lineage whose objectives and approach he aimed to share. → more

●Article
In the Footsteps of the Bauhaus — Its Reception and Impact on Brazilian Modernity

Through the strong German-speaking minority and its active work in the creation and mediation of culture in the spirit of modernity, the application of Bauhaus formal language, especially in the first phase of Brazilian modernity, has played a considerable role. It was only with the equation of German culture with National Socialism and the ensuing intolerance of German protagonists that these architectural and cultural activities were severely disrupted. In Brazil during this period, a style of modernism based on the principles of Le Corbusier finally gained acceptance. The impulses of the Bauhaus, however, which were not perceived for many years, were also reinterpreted and further developed within Brazil, although they remained occulted in comparison to the public reception of Corbusier. → more

●Article
Ivan Serpa, Lygia Clark, and the Bauhaus in Brazil

The art school of the Museu de Arte Moderna do Rio de Janeiro was established in 1952, led by Ivan Serpa, who gave classes for both children and adults—including artists who would go on to form the Grupo Frente (1954–56) and later the neo-concrete movement (1959–61). Writer and critic Mário Pedrosa described the “experimental” character of these classes, but the fact this experimentation was structured through study of color, materials, technique and composition has encouraged art historian Adele Nelson to claim Serpa’s teaching method was substantially based on the Bauhaus preliminary course. → more

●Article
Walking on a Möbius Strip — The Inside/Outside of Art in Brazil

This text investigates how the topological figure of the Möbius strip, famously propagated by Bauhaus proponent Max Bill, was used in Brazil within dissident artistic practices of the 1960s and 1970s as a tool for reflection on the subject, alterity and public space. The Möbius strip is revisited in this essay as a conduit for thinking critically about possible subversions of Eurocentric forms, as well as various appropriations of traditional popular culture by modern and contemporary art in Brazil. → more

●Article
The Poetry of Design — A search for multidimensional languages between Brazilian and German modernists

In the 1950s and 1960s, intense debates and exchanges took place between Brazilians and Germans working in the fields of design, art, and their various manifestations—from architecture and painting to music and poetry. These intertwined lines are identifiable in myriad events: journeys, meetings, exchanges of letters, exhibitions, lectures, courses, and publications. Common modes of production emerged out of these different encounters where, more than relations of influence, one can observe how entangled realities led to a questioning of the directionality of the flow between center and periphery. → more

●Article
The Latent Forces of Popular Culture — Lina Bo Bardi’s Museum of Popular Art and the School of Industrial Design and Crafts in Bahia, Brazil

This text deals with the experience of the Museum of Popular Art (MAP) and the School of Industrial Design and Handicraft, designed by the Italian-Brazilian architect Lina Bo Bardi, in Salvador (capital of the state of Bahia), Brazil. Such a “school-museum” is based on the capture and transformation of latent forces that exist in Brazilian popular culture. → more

●Article
Teko Porã — On Art and Life

Cristine Takuá is an Indigenous philosopher, educator, and artisan who lives in the village of Rio Silveira, state of São Paulo, Brazil. She was invited to present a contemporary perspective on questions and tensions raised by interactions between the Indigenous communities and the mainstream art system, as well as to address Brazil’s specific social and political context. → more

●Article
Times of Rudeness — Design at an Impasse

In 1980, Lina Bo Bardi began working on a book concerning her time in the northeastern part of Brazil. With the help of Isa Grinspum Ferraz, she captioned the illustrations, revised her contributions to the book and drafted the layout and contents. The latter also included texts by her collaborators who, in a truly collective effort, had tried to envision the project of a true Brazil—an unfettered and free country with no remnant remaining of the colonial inferiority complex which had plagued the country earlier in its history. Bo Bardi discontinued her work in 1981. In 1994, the Instituto Lina Bo e P.M. Bardi published this project as Times of Rudeness: Design at an Impasse. → more

●Article
Connecting the Dots — Sharing the Space between Indigenous and Modernist Visual Spatial Languages

Ever increasing numbers of design institutes note the merits of cultural diversity within their pedagogy and practice. Rather quixotically, however, Eurocentric modernist ideals remain dominant within design curricula. This ambiguity results in non-Western social, cultural and creative practice, remaining side-lined, albeit while still being lauded as of great value. Critical of this duplicity, this paper introduces three Indigenous visual spatial languages, identifying a number of correlations and contradictions these offer to the establishment and implementation of Bauhaus pedagogy and subsequent examples of modernism adopted beyond Europe. → more

+ Add this text to your collection!